|
TEMOIGNAGE DE MORGANE
(Maladie de Crohn depuis
1983)
Mon histoire a commencé il y a 23 ans. A
l'époque, j'en avais 7. J'ai commencé à avoir certains symptômes. Perte
de poids, sang dans les selles, extrême fatigue ...
J'ai eu l'occasion de consulter de nombreux médecins dans ma région
puis, comme ils ne progressaient pas dans leur diagnostic, je suis allée
consulter un spécialiste à l'hôpital Necker à Paris. J'étais très
faible, je tenais à peine debout, je ne grandissais plus (je faisais
1m17 pour 17 kgs), j'avais perdu mon beau sourire et mes jolies
fossettes. Après plusieurs examens (les mêmes que dans ma région), le
gastro avait découvert la maladie de Crohn.
Le médecin décida donc me mettre sous nutrition entérale exclusive. La
nutrition entérale se fait par le moyen d'une sonde qui passe par le nez
et qui va directement dans l'estomac.
A l'époque, j'étais en primaire. Heureusement que j'habitais un petit
village et que tout le monde était compréhensif. Mais dès que je sortais
de chez moi, les gens se montraient très curieux, même mal polis et cela
me mettait vraiment mal à l'aise. Le plus dur a été lorsque je suis
rentrée au collège. Nous étions environ 900 élèves et là, les moqueries
allaient bon train : Eh, vous avez vu l'extraterrestre ... » ou «Eh,
elle est jolie ta trompe d'éléphant ! ! », et j'en passe et des
meilleures.. Pour couronner le tout, comme j'étais toujours en poussée
(la maladie était très active), le médecin avait décidé de me donner de
la cortisone. Je vous passe les détails sur les nouvelles moqueries dues
à mon poids.
Ensuite, vu l'échec de la nutrition entérale, mon médecin décida de me
mettre sous nutrition parentérale. C'est par un cathéter que j'avais mes
vitamines. Heureusement, nous avons pu effectuer les perfusions à
domicile. Une infirmière de l'hôpital apprend aux parents à «brancher»
les enfants. Ainsi ils peuvent rentrer chez eux tout en respectant des
mesures d'hygiène très strictes. Ainsi, ils ont la possibilité de vivre
quasiment comme les autres et de continuer à aller à l'école
normalement.
La maladie s'est rappelée à moi en 1987. Devant l'échec des traitements,
les médecins ont décidé d'enlever tout le colon, et un bon bout de
l'intestin grêle. Je ne garde pas de très bons souvenirs de cette
opération car j'ai fait de nombreuses complications et j'ai bien cru que
je n'allais pas m'en sortir.
Après cette opération, j'ai pu vivre quelques années tranquille mais
c'était sans compter sur ce bon Crohn qui n'avait pas dit son dernier
mot.
J'ai donc refais une poussée en 1993. Les médecins ont alors décidé de
me faire une stomie, c'est-à-dire un anus artificiel. Ce petit bout
d'intestin qui sort au niveau de l'abdomen n'est pas évident à accepter
surtout lorsque l'on a 16 ans et que l'on voudrait bien profiter un peu
de la vie. J'ai aussi eu la chance d'avoir une stomathérapeute géniale
qui m'a appris à accepter ma poche et à la gérer seule.
Ensuite, après de petites poussées pas trop sévères, le Crohn est revenu
en force quelques mois après la fin de mes études (j'ai quand même
réussi à décrocher mon diplôme de BTS Assistant de Direction). Sur les 1
mètre 20 de grêle restant, j'avais 2 sténoses et l'intestin était très
abîmé sur les 20 derniers centimètres. J'avais perdu énormément de poids
car je ne pouvais plus manger. Après avoir essayé un nouveau traitement
(le méthotrexate), j'ai finalement dû me faire opérer en mai 2000. Le
chirurgien m'a encore enlevé 20 cm de grêle. Cette opération s'est
magnifiquement bien passée et maintenant je profite un maximum. Je
n'arrête pas de manger et d'ailleurs, je prends du poids ce qui ne
m'était pas arrivé depuis très longtemps.
A ce jour, je suis tout de même perfusée 1 à 2 fois par semaine
essentiellement pour me réhydrater et m'apporter quelques vitamines.
J'ai le bonheur d'avoir rencontré mon ami il y a maintenant 4 ans. Il s'est très bien habitué à mes "soucis" de santé dès le début et
j'espère que cela va durer longtemps !!
Ma maladie m'a beaucoup appris sur la vie. Il faut profiter de chaque
moment car on ne sait pas de quoi sera fait demain. J'ai eu la «chance»
de rencontrer la maladie très jeune, ce qui m'a permis de m'adapter à ce
mode de vie.
Heureusement, j'ai toujours été entourée par des équipes médicales très
sympathiques, que ce soit en pédiatrie ou maintenant chez les adultes et
je crois que c'est aussi grâce au personnel qui nous écoute et nous
conseille que l'on arrive à s'en sortir.
|
|